VIRIOT Paul : carnet d’un soldat au 37eRI

Paul VIRIOT est né en 1883 à Laitre sous Amance , village  de Lorraine .

Il a recopié sur ce petit carnet sa vie de soldat au jour le jour . Ce petit livre lui fut offert dans des circonstances tragiques par l’adjudant Numa VINCENT du 224 éme d’infanterie…En voici quelques extraits…

Le colonel en tête , sabre au côté et en gants blancs marche tranquillement devant ses hommes alignés comme pour une revue . Ils ont le fusil sur l’épaule avec baïonnette au canon . Ils débouchent d’une petite crête en contre bas et sont maintenant en pleine vue des boches
Les malheureux !!!! …./….
Le malheureux vomit le sang , ses yeux deviennent vitreux , sa chemise teintée de rouge à trois ou quatre endroits . A la brume ses hommes l’emportent et me laisse en remerciement son équipement dont ce petit livre qui me servira à noter mes campagnes …/….
Nous voici à Laneuveville , de nombreux bateaux transportent des blessés boches . Le canon fait rage sur Maixe ou notre régiment s’est réorganisé . La bataille pour Maixe , pris et repris durera jusqu’au 11 Septembre . Puis ce sera la retraite de l’ennemi grâce à la victoire de la Marne . Le grand couronné est dégagé , Nancy sauvé…/…
Partons de Poperinghe pour Grombecque, les jeunes recrues de la classe 14 arrivent. Les pauvres ne savent pas encore ce qui les attends .La pluie redouble d’intensité
A Leuvrec , on ne peut plus circuler tant les troupes sont nombreuses…/…
C’est alors que survint ce sifflement sinistre connu de tous . L’explosion fut immédiate et si violente que nous fûmes tout trois culbutés . J’avais senti qu’il était pour nous à son passage et tout en me couchant je criai attention ….ça y est …c’est mon heure
Une fois la fumée dissipée et notre émotion calmée , nous fîmes le compte des dégâts .
Seul mon talon de chaussure manquait à l’appel . Mais O miracle j’étais indemne …./….
Il fait toujours aussi froid , la glace porte bien , la canonnade au loin fait rage…/…
A 6h40 l’attaque commence par une violente fusillade . 10 h retour des premiers blessés , triste spectacle … Un en particulier me frappe , il n’a plus de nez et un trou sanglant au milieu du visage , quel pitié !!!! …/…
Le poste de secours est à 100m , des équipes de brancardiers ramènent les premiers blessés . C’est affreux , le premier a la mâchoire brisée , un bras arraché et le côté ouvert . Le second dont le visage est réduit à une bouillie informe ne cesse de crier …. C’est pour la France …..C’est pour la France…/…
A 9h20 précise le plus beau et terrifiant spectacle que l’on puisse imaginer nous est donné par ces 850 pièces d’artillerie . Elles vomissent le feu à une cadence infernale , impossible de parler a son voisin . Les oreilles me font atrocement souffrir , nous sommes rendus fous par ce vacarme . Devant nous à 2km la ligne allemande est en feu , la fumée tellement dense que l’on ne vois plus rien …/…
Moi même je reçois un shrapnel , heureusement que j’ai ma calotte en tôle ramassée quelques instants plus tôt sur un de nos soldat mort . L’éclat glisse sur mon képi , mon sergent Chalet n’ a pas la même chance , il a le crane défoncé Tutoye mon voisin a le côté ouvert et meurt aussi…/…
Mais bientôt le coup de sifflet retentit , aux plaisanteries succède un silence glacial…
 Baïonnettes aux canons !!!!!!
Seuls ceux qui ont entendus ces mots peuvent en mesurer le sens , …/…

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